1. ARAGON, le fou d’Elsa 2. Louis ARAGON (1897-1982)• Je suis né en 1897 à Neuilly-sur-Seine. Attiré parles lettres dès l’enfance, j’entreprends desétudes de médecine en 1917.Je rencontre AndréBreton avec qui je me lie d’amitié. D’abordséduit par l’aventure dadaïste, je m’en détachetrès vite, et participe, en 1923, à la fondation dumouvement surréaliste. En 1928, je fais laconnaissance d’Elsa Triolet, qui deviendra macompagne et ma muse. Convaincu désormaisque l’intellectuel et l’artiste se doivent d’avoirune conduite militante, j’adhère au PartiCommuniste en 1936 et participe à la campagnedu Nord lors de la déclaration de la SecondeGuerre Mondiale. Je suis mort en 1982 à Paris. 3. Œuvres principales*le Paysan de Paris• *les Cloches de Bâle• *les Beaux Quartiers• *les Yeux d’Elsa• *la Diane française• *Crève-cœur 4. Que serais-je sans toi?Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontreQue serais-je sans toi qu’un cœur au bo.. dormantQue cette heure arrêtée au cadran de la montreQue serais-je sans toi que ce balb . . . . . . . .J’ai tout appris de toi sur les choses humainesEt j’ai vu désormais le monde à ta façonJ’ai tout appris de toi comme on boit aux fon . . . . . .Comme on lit dans le ciel les étoiles loin . . . . . .Comme au passant qui chante on reprend sa chansonJ’ai tout appris de toi jusqu’au sens du fri . . . . 5. Que serais-je sans toi?• J’ai tout appris de toi pour ce qui me concerneQu’il fait jour à mi . . qu’un ciel peut être bleuQue le bonheur n’est pas un quinquet de taverneTu m’as pris par la main dans cet en . . . moderneOù l’homme ne sait plus ce que c’est qu’être deuxTu m’as pris par la main comme un amant heu . . . .Qui parle de bonheur a souvent les yeux tristesN’est-ce pas un sang . . . de la déconvenueUne corde brisée aux doigts du gui . . . . . . .Et pourtant je vous dis que le bonheur existeAilleurs que dans le rêve ailleurs que dans les nuesTerre terre voici ses rades inconnues.Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontreQue serais-je sans toi qu’un cœur au bois dormantQue cette heure arrêtée au cadran de la montreQue serais-je sans toi que ce balbutiement.• 6. Il n’ y a pas d’amour heureux• Rien n’est jamais ac…. à l’homme ni sa f…..• Ni sa faiblesse ni son cœur et quand il croit• Ouvrir ses bras son ombre est celle d’une croix• Et quand il croit se…. son bonheur il le br…• Sa vie est un étrange et douloureux di…..•• Il n’y a pas d’ amour heureux•• Sa vie elle ressemble à ces soldats sans armes• Qu’on avait ha…… pour un autre de….• A quoi peut leur servir de se lever matin• Eux qu’on retrouve au soir dés……. inc…….• Dites ces mots ma vie et retenez vos larmes•• Il n’y a pas d’amour heureux 7. Il n’ y a pas d’amour heureux• Mon bel amour mon cher amour ma dé…….• Je te porte dans moi comme un oiseau blessé• Et ceux-là sans savoir nous regardent passer• Répétant après moi les mots que j’ai tr…..• Et qui pour tes grands yeux tout aussitôt mo…….•• Il n’y a pas d’ amour heureux•• Le t…. d’apprendre à vivre il est déjà trop tard• Que ple….. dans la nuit nos cœurs à l’un…..• Ce qu’il faut de ma….. pour la mo….. chanson• Ce qu’il faut de re….. pour payer un fr…..• Ce qu’il faut de sa…… pour un air de guitare•Il n’ y a pas d’ amour heureux• La Diane française 8. L’ affiche rougeVous navez réc.... la gloire ni les larmes•Ni lor... ni la prière aux agonisants•Onze ans déjà que cela passe vite onze ans•Vous vous étiez servi simplement de vos ar...•La mort néblouit pas les yeux des Partisans.•• Vous aviez vos po....... sur les murs de nos villes• Noirs de barbe et de nuit hirsutes men......• Laffiche qui semblait une tache de sang• Parce quà prononcer vos noms sont dif.......• Y cherchait un effet de peur sur les passants.• Nul ne semblait vous voir Français de préférence• Les g--- allaient sans yeux pour vous le jour durant• Mais à lheure du couvre-feu des doigts errantsAvaient écrit sous vos ph---- MORTS POUR LA FRANCE• Et les mornes matins en étaient différents. 9. Strophes pour se souvenirTout avait la couleur uniforme du gi...• A la fin février pour vos derniers mo.....• Et cest alors que lun de vous dit calmement• Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre• Je meurs sans ha... en moi pour le peuple allemand.•• Adieu la peine et le pla.... Adieu les roses• Adieu la vie adieu la lu..... et le vent• Marie-toi sois heu..... et pense à moi souvent• Toi qui vas dem..... dans la beauté des choses• Quand tout sera fini plus tard en Erivan.*•• Un grand soleil dhi... éclaire la colline• Que la nature est belle et que le cœur me fend• La justice viendra sur nos pas triomphants• Ma Mélinée ô mon amour mon orp------• Et je te dis de vivre et davoir un enfant.•• Ils étaient vingt et trois quand les fu.... fleurirent• Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps• Vingt et trois ét------- et nos frères pourtant• Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir• Vingt et trois qui criaient la France en sab...... . 10. ELSA, MON AMOUR, MA JEUNESSESuffit-il donc que tu paraissesDe lair que te fait rattachantTes cheveux ce geste touchantQue je ren..... et reconnaisseUn monde habité par le chantElsa, mon amour ma jeunesseÔ forte et douce comme un vinPar..... au soleil des fenêtresTu me rends la caresse dêtreTu me rends la soif et la faimDe vi… encore et de connaîtreNotre histoire jusquà la fin 11. Elsa, mon amour, ma jeunesse• Cest miracle que dêtre ens.....Que la lum.... sur ta joueQuautour de toi le vent se joueToujours si je te vois, je tre....Comme à son premier rendez-vousUn jeune ho... qui me ressemblePour la première fois ta bouchePour la première fois ta voixDune aile à la ci.. des boisLarbre frémit jusquà la soucheCest toujours la première foisQuand ta robe en passant me touche 12. Elsa• Ma vie en vérité commenceLe jour où je tai rencontréeToi dont les bras ont su barrerSa route atroce à ma dém....Et qui ma montré la contréeQue la bonté seule ensemence•Tu vins au cœur du désarroiPour chasser les mau...... fièvresEt jai flambé comme un genièvreA la Noël entre tes doigtsJe suis né vraiment de ta lèvreMa vie est à partir de toi. 13. HEUREUX CELUI QUI MEURT D’AIMER• Ô mon jardin d’eau fra…. et d’ombre• Ma danse d’être mon cœur som…• Mon ciel d’étoiles sans nombre• Ma barque au loin dou.. à ramer• Heureux celui qui devient sourd• Au chant s’il n’est de son amour• Av….. au jour d’après son jour• Ses yeux sur toi seule fermés 14. Heureux celui qui meurt d’aimer• Heureux celui qui meurt d’aimer•• D’aimer si fort ses lèvres clo…• Qu’il n’ait besoin de nulle chose• Hor… le souvenir des roses• À jamais de toi parfumées• Celui qui meurt même à dou….• À qui sans toi le monde est leurre• Et ne retient que tes couleurs• Il lui suffit qu’il t’ ait nom…•• Heureux celui qui meurt d’aimer• Heureux celui qui meurt d’aimer.• 15. Heureux celui qui meurt d’aimer• Mon enfant dit-il ma chère âmeLe te… de te connaître ô femmeLéternité nest quune pâmeAu feu dont je suis cons…Il a dit ô femme et quil taiseLe nom qui ressemble à la braiseA la bouche rouge à la fra…A jamais dans ses dents forméeHeureux celui qui meurt daimerIl a dit ô femme et sach…Ainsi la vie, ainsi l e rêveEt soit sur la place de grè..Ou dans le lit accoutuméJeunes amants vous dont cest lâgeEntre la ronde et le voyageFou sépargnant qui se croit sageCr…à qui vous veut blâmer 16. Est-ce ainsi que les hommes vivent ?• Tout est affaire de décor• Changer de lit changer de corps• A quoi bon puisque cest encore• Moi qui moi-même me trahis• Moi qui me traîne et mépa……• Et mon ombre se déshabille• Dans les bras semb…… des filles• Où jai cru trouver un pays• Cœur léger cœur changeant cœur lourd• Le temps de rê… est bien court• Que faut-il faire de mes jours 17. Est-ce ainsi que les hommes vivent?• Que faut-il faire de mes nuits• Je navais amour ni dem….• Nulle part où je vive ou meure• Je passais comme la rum…• Je mendormais comme le bruit• Est-ce ainsi que les hommes vivent• Et leurs baisers au loin les suivent• Cétait un temps déraisonnable• On avait mis les mo… à table• On faisait des châteaux de sable• On prenait les loups pour des chiens 18. Est-ce ainsi que les hommes vivent?• Tout changeait de pôle et dépaule• La pièce était-elle ou non dr…• Moi si jy tenais mal mon rôle• Cétait de ny comprendre rien• Dans le quartier Hohenzollern• Entre la Sarre et les cas…..• Comme les fleurs de la luzerne• Fleurissaient les seins de Lola• Elle avait un cœur dhir…….• Sur le canapé du bordel• Je venais mallonger près delle• Dans les hoquets du pianola• Est-ce ainsi que les hommes vivent• Et leurs baisers au loin les suivent 19. Est-ce ainsi ….• Le ciel était gris de nu….• Il y volait des oies sauvages• Qui criaient la mort au passage• Au-dessus des maisons des quais• Je les voyais par la fenêtre• Leur chant tr…. entrait dans mon être• Et je croyais y reconnaître• Du Rainer Maria Rilke• Elle était brune elle était blanche• Ses cheveux tombaient sur ses hanches• Et la semaine et le di……• Elle ouvrait à tous ses bras nus• Elle avait des yeux de faïence• Elle travaillait avec vail…..• Pour un artilleur de Mayence• Qui nen est jamais revenu• Est-ce ainsi que les hommes vivent• Et leurs baisers au loin les suivent 20. Est-ce ainsi que les hommes vivent?• Il est dautres so….. en ville• Et la nuit montent les civils• Remets du rimmel à tes cils• Lola qui ten iras bientôt• Encore un verre de liq….• Ce fut en avril à cinq heures• Au petit jour que dans ton cœur• Un dragon plongea son cou….• Est-ce ainsi que les hommes vivent• Et leurs baisers au loin les suivent• Comme des soleils révolus• 21. Aimer à perdre la raison• Aimer à perdre la raisonAimer à nen savoir que direA navoir que toi dhorizonEt ne con…… de saisons SavoirQue par la dou…. du partir SouffranceAimer à perdre la raisonAh cest toujours toi que lon blesseCest toujours ton mir… briséUne glaceMon pauvre bonheur, ma faiblesseToi quon insulte et quon délaisseDans toute chair marty…..Suppliciée 22. Aimer à perdre la raisonAimer à perdre la raisonAimer à nen savoir que direA navoir que toi dhorizonEt ne connaître de saisonsQue par la douleur du partirAimer à perdre la raisonLa faim, la fa….. et le froid La lassitudeToutes les mis….. du mondeLes peinesCest par mon amour que jy croisEn elle je porte ma croixEt de leurs nuits ma nuit se fonde 23. Que sais-tu du malheur d’aimer ?• Que sais-tu des plus sim…. choses BanalesLes jours sont des soleils gri… MaquillésDe quoi la nuit rê…. les rosesSongentTous les feux sen vont en fuméeQue sais-tu du malheur daimerJe tai cherchée au bout des chambresOù la lampe était alluméeNos pas ny son…… pas ensembleRésonnaientNi nos bras sur nous refermésQue sais-tu du ma….. daimerAntonyme bonheur 24. Le malheur d’aimer• Je tai cherchée à la fenêtreLes pa… en vain sont parfumésJardinsOù peux-tu où peux-tu bien êtreA quoi bon vi… au mois de maiAntonyme mourirQue sais-tu du malheur daimerQue sais-tu de la lo…. Attente Antonyme courteEt ne vivre quà te nommerDieu toujours mê.. et différente PareilleEt de toi moi seul à blâmerQue sais-tu du malheur daimerQue je moublie et je dem….Je resteComme le rameur sans ramerSais-tu ce quil est long quon me…ExpireA sécouter se consumerConnais-tu le malheur daimer 25. L’étrangèreIl existe près des éclusesUn bas quartier de bohé….. Des gitans DDont la belle jeunesse suseA démêler le tien du mienEn ban.. on sy rend en voitureen groupeOrdinairement au mois daoûtIls disent la bonne aventurePour des pim…. et du vin doux Ils piquentOn passe la nuit claire à boireOn danse en fra….. dans ses mainsTapantOn na pas le temps de le croireIl fait gr… jour et cest demain antonyme petitaaOn revient dune seule traiteGa.. sans un sou vaguement gris JoyeuxAvec des fleurs plein les charrettesSon destin dans la paume écrit 26. L’étrangèreJai pris la main dune éphémèreQui ma suivi dans ma maisonElle avait les yeux doutre-merElle en montrait la déra….La folieElle avait la marche légèreEt de longues jambes de fa..Un BambiJaimais déjà les étrangèresQuand jétais un petit enfantCelle-ci parla vite viteDe lodeur des magno….Des fleursSa robe tomba tout de suiteQuand ma hâte la déliaEn ce temps-là jétais cré….NaïfUn mot métait promissionEt je prenais les campanulesPour les fleurs de la passion 27. L’étrangèreA chaque fois tout recommenceToute musique me séduitEt la plus ban… romance simpleMest léternelle poésieNous avions joué de notre âmeUn long jour une courte nuitPuis au matin bonsoir madameLamour sach… avec la pluiese termine 28. IL NAURAIT FALLU• Il naurait falluQuun moment de plusPour que la mort vienneMais une main nueAlors est venueQui a pris la mienneQui donc a renduLeurs couleurs perduesAux jours aux semainesSa réalitéA limmense étéDes choses humainesMoi qui frémissaisToujours je ne saisDe quelle colèreDeux bras ont suffiPour faire à ma vieUn grand collier dair 29. Il n’aurait falluRien quun mouvementCe geste en dormantLéger qui me frôleUn souffle poséMoins une roséeContre mon épauleUn front qui sappuieA moi dans la nuitDeux grands yeux ouvertsEt tout ma sembléComme un champ de bléDans cet universUn tendre jardinDans lherbe où soudainLa verveine pousseEt mon cœur défuntRenaît au parfum 30. Il n’aurait fallu• Il naurait falluQuun moment de plusPour que la mort vienneMais une main nueAlors est venueQui a pris la mienne 31. La poésie c’est unepharmacopée universelle. Louis ARAGON