AXE 4 : « DESIGNER NOTRE VIE : PRATIQUES ARTISTIQUES ET FIGURES DE L’URBANITÉ » UNIVERSITÉ DE BORDEAUX 3 — 01 FÉVRIER 2012 #MICALE GESTE DE DESIGN FONDEMENTS DE THÉORIE DU DESIGN stéphane vial www.reduplikation.net www.lektum.com twitter.com/svial 1 vendredi 3 février 12 D’OÙ JE PARLE ? Philosophie du design 2 vendredi 3 février 12 AU MENU DU MICA AUJOURD’HUI 1. Introduction : penser le design ? 2. Poïétique : le geste de design 3. Esthétique : l’effet de design 4. Conclusion : Designare aude ! 3 vendredi 3 février 12 OUVERTURE “BEAUTIFUL DESIGNER KITCHENS” • les gens et les médias disent : « c’est design », c’est-à-dire : c’est beau, élégant, distingué, chic, « classe » c’est moderne, récent, nouveau, original, branché, « tendance » c’est décalé, bizarre, extravagant, fou consommons le signifiant « design » comme les autres le design est aussi un signifiant de consommation (Baudrillard) • nous vendredi 3 février 12 I. INTRODUCTION PENSER LE DESIGN ? 5 vendredi 3 février 12 LE DESIGN, MATIÈRE À PENSER Le design ne cesse de penser, mais il est incapable de se penser. Il n’a encore jamais produit une théorie de lui-même, comme l’art a pu le faire. Penser le design, c’est être pris dans ce paradoxe liminaire : le design est avant tout une pratique de la pensée, mais il n’y a pas de pensée du design. 6 vendredi 3 février 12 LA FIXATION CALLO-CENTRISTE Les philosophes ne se sont préoccupés jusqu’ici que du beau et des beaux-arts devenus arts plastiques (puis art contemporain) Ils ont complètement ignoré les arts décoratifs et les arts appliqués, « arts mineurs » devenus design (au rôle majeur !) 7 vendredi 3 février 12 PENSER LE DESIGN, IL EST TEMPS DE L’OSER 8 vendredi 3 février 12 POSTULAT ÉPISTÉMOLOGIQUE : LE DESIGN EST UN CONCEPT il compose un nouveau champ disciplinaire socialement identifié et constitué il renverse toutes les positions antérieures des problèmes placés sous le nom de l’art ou de la technique 9 vendredi 3 février 12 INTRODUCTION À UNE PHILOSOPHIE DU DESIGN Le principal objectif de mon Court traité du design : commencer à tracer une ligne de démarcation claire entre design et non-design Ce qui suppose de caractériser en propre le geste de design et de le distinguer du geste artistique 10 vendredi 3 février 12 QU’EST-CE QU’UN GESTE DE DESIGN ? QU’EST-CE QUI LE CARACTÉRISE EN PROPRE ? QUE VISE-T-IL ET QUE PRODUIT-IL ? QUEL EST SON EFFET SUR LE MONDE ? vendredi 3 février 12 PROPOSITION THÉORIQUE geste de design ↓ effet de design 12 vendredi 3 février 12 II. POÏÉTIQUE : LE GESTE DE DESIGN 13 vendredi 3 février 12 LA MÉTHODE POÏÉTIQUE • aisthêsis (αἴσθησις), « perception, sensation » => esthétique poïêsis (ποίησις), « création, fabrication » => poïétique Distinction introduite par Paul Valéry en 1937 : ESTHÉTIQUE : étude de la phénoménalité artistique et donc de la réceptivité POÏÉTIQUE : étude de la générativité artistique, et donc de la créativité Didier Anzieu, Le corps de l’œuvre, 1981, p. 10 : « ... je peux délimiter avec précision mon domaine d’étude. C’est celui de la poïétique, c’est-à-dire de la production de l’œuvre par le créateur. Je laisse de côté l’esthétique, qui concerne l’effet de l’œuvre sur son public. » René Passeron, colloque international de Poïétique,1989 : « L'objet de la poïétique est en amont des oeuvres, celui de l'esthétique est en aval. » • • • vendredi 3 février 12 POÏÉTIQUE DU DESIGN l’étude du design comme phénomène de création EN QUOI CONSISTE-T-IL ? vendredi 3 février 12 LE DESIGN EST UN THINKING C’EST-À-DIRE UN PROCESSUS DE PENSÉE vendredi 3 février 12 DESIGN + THINKING = DESIGN THINKING ? vendredi 3 février 12 LE DESIGN COMME UNE CHOSE QUI PENSE • Tim Brown, IDEO, depuis 2005 : le design est un “design thinking”, c’est-àdire une manière de penser propre au designer, une méthode de pensée, voire une pratique de penseur (ce qui le rapproche de l’activité philosophique) 3 étapes majeures dans le processus du design thinking : -- l’inspiration : « human needs is the place to start » -- l’idéation : « learning by making » (prototyper, prototyper) -- l’implémentation : mise en œuvre participative du projet (partager la capacité faire du design avec les usagers) le concept de « design thinking » : le seul concept de design que les designers ont été capables de produire pour définir ce qu'ils font. Met l’accent sur le design comme méthode de pensée impliquée dans un faire. • • vendredi 3 février 12 LE DESIGN COMME THINKING • Étymologie anglaise : to design, « concevoir » en fonction d’un plan, d’une intention, d’un dessein => la culture de projet du design = élaborer un projet qui repose sur un concept et une pensée : -- un concept, i.e. une idée qui organise et structure le projet -- une pensée, i.e. une analyse du monde contemporain qui nourrit le projet thinking est le savoir-penser du designer • Faire • Le vendredi 3 février 12 LE THINKING DU DESIGNER N’APPARAÎT PAS DANS LES MOTS MAIS DANS LES PROTOTYPES vendredi 3 février 12 POUR UN DESIGNER PENSER, C’EST DESSINER PENSER, C’EST MAQUETTER PENSER, C’EST PROTOTYPER vendredi 3 février 12 LA PENSÉE (COMME OPÉRATION CRÉATIVE) DANS LE DESIGN N’APPARAÎT QUE QUAND COMMENCE LE FAIRE vendredi 3 février 12 LE DESIGN COMME DOING • Étymologie latine : designare, « marquer d’un signe distinctif, dessiner, indiquer » : de + signum, « marque, signe » => la culture du dessin Faire du design, c’est marquer d’un signe, c’est “dessigner” ou dessiner, c’està-dire former des signes ou signer des formes (spatiale, volumique, textile, graphique, interactive) : -- classiquement, c’est l’idée du dessin (plans, croquis, perspectives, zonings...) -- aujourd’hui, c’est l’idée du prototype (dessins, plans, maquettes, patrons, wireframes...) Le propre du travail de designer, ce qui le distingue de tout autre corporation créative, c’est la pratique de la modélisation formelle : là est le geste de design en propre comme geste de pensée modélisante • • vendredi 3 février 12 LE GESTE DE DESIGN UN SAVOIR-PENSER IMMANENT À UN SAVOIR-PROTOTYPER • cette capacité de penser propre au designer peut s’exporter dans n’importe quel autre champ (Voir le « design des politiques publiques » de la 27ème région) design comme méthodologie • le vendredi 3 février 12 III. ESTHÉTIQUE : L’EFFET DE DESIGN 25 vendredi 3 février 12 ESTHÉTIQUE DU DESIGN l’étude du design comme phénomène du monde (réception) QUEL EFFET PRODUIT-IL ? vendredi 3 février 12 RAPPEL DE LA PROPOSITION THÉORIQUE geste de design ↓ effet de design Thèse : un geste de design consiste à produire un effet de design 27 vendredi 3 février 12 LE DESIGN EST PRINCIPALEMENT UN EFFET • avant d’être un espace, un produit ou un service, le design est principalement un effet qui advient dans un espace, un produit ou un service. • le design n’est pas un étant mais un événement il n’est pas « une chose qui est » mais « une chose qui arrive » (Kenya Hara) une incidence ou un retentissement sur les choses • il n’est pas non plus une propriété des choses mais vendredi 3 février 12 UN EFFET DE DESIGN EST UN EFFET D’EXPÉRIENCE • un effet de design est un événement qui se produit dans l’expérience d’un usager • un effet de design transforme un usage brut en une expérience-à-vivre qu’un sujet peut éprouver et qui améliore son expérience d’exister choses, soit en proposant de nouvelles possibilités, soit en apportant de la poésie ou du plaisir • soit en résolvant des problèmes, soit en simplifiant des vendredi 3 février 12 L’EFFET CALLIMORPHIQUE • un effet de design produit une expérience-à-vivre qui passe par la forme • une forme issue du design peut être spatiale, volumique, textile, graphique ou interactive • l’effet de design est callimorphique car il produit une « prime de séduction » (Freud), i.e. un supplément désinteressé de plaisir lié à la perception de la beauté formelle • exemple : l’iMac vendredi 3 février 12 L’EFFET SOCIOPLASTIQUE • un effet de design produit une expérience-à-vivre destinée aux autres = les usagers • il modifie les usages, les manières de faire, les comportements et les modes de vie, il réinvente des mondes pratiques sociales (« sculpture sociale » selon Bernard Stiegler) • l’effet de design est socioplastique car il transforme les • exemple : Vélib’ vendredi 3 février 12 IV. CONCLUSION DESIGNARE AUDE ! 32 vendredi 3 février 12 LE DESIGN, REPENSER LE MONDE ? • XIXe siècle - XXe siècle (1850-1945) : le design face à l’industrialisation (du rejet à l’assomption) = des designers-artistes qui refusent la production industrielle (Morris, Van de Velde) jusqu’aux premiers “industrial designers” (Behrens, Gropius, Loewy) XXe siècle (1945-1999) : le design face à la consommation (l’alliance du design et du capitalisme de masse) = “un clergé de gens en col roulé noir avec des lunettes de designer qui travaillent sur des petites choses” centrées sur l’esthétique, l’image et la mode (Tim Brown, TED, juillet 2009) XXIe siècle (2000’s) : le design face à l’innovation (le design social, le design de services, le design numérique, le design durable...) = des penseurs de systèmes moins préoccupés par les objets et plus soucieux de problèmes globaux dans le but de réinventer le monde (“design is getting big again”, Tim Brown, TED, juillet 2009) 33 • • vendredi 3 février 12 PHILOSOPHIE DU DESIGN : LE DESIGN EST UNE VALEUR il est une valeur d’enthousiasme et d’enchantement il nous porte à voir en avant et croire en avant Designare aude ! (« Ose faire du design !) le design comme art d’enchanter l’existence par les formes « Seuls ceux qui sont assez fous pour penser qu’ils peuvent changer le monde y parviennent » (Steve Jobs) 34 vendredi 3 février 12 < MERCI /> Retrouvez cette présentation sur www.slideshare.net/reduplikation stéphane vial
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