12 Philo Explication
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LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie VauthierCopie n°12 L’élève : Marion Le professeur : Nathalie Vauthier Copie n° 12 « Il est impossible, en la compagnie du corps, de rien connaître l purement » Le sujet Type de sujet : Commentaire de texte Objets d’étude : La morale (la vérité – Le sujet a vérité) Séries : S, ES ,L L’énoncé Expliquez le texte suivant. La connaissance de l’auteur n’est pas requise. Il faut et il suffit que l’explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question. 1 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 Le texte Platon, Le Phédon. Tant que nous aurons le corps, et qu’un mal de cette sorte restera mêlé à la pâte de notre âme, il est impossible que nous possédions jamais en suffisance ce à quoi nous aspirons ; et, nous l’affirmons, ce à quoi nous aspirons, c’est le vrai. […] Désirs, appétits, peurs, simulacres en tout genre, futilités [le corps] nous en remplit si bien que, comme on dit, pour de vrai et pour de bon, à cause de lui il ne nous sera jamais possible de penser, et sur rien. […] Pour nous, réellement, la preuve est faite : si nous devons jamais savoir purement quelque chose, il faut que nous nous séparions de lui et que nous considérions avec l’âme elle-même les choses elles-mêmes. Alors, à ce qu’il me semble, nous appartiendra enfin ce que nous désirons et dont nous affirmons que nous sommes amoureux : la pensée. Cela, une fois que nous aurons cessé de vivre, et non pas – tel est le sens du raisonnement – de notre vivant. Car s’il est impossible, en la compagnie du corps, de rien connaître purement, de deux choses l’une : ou bien il n’existe aucune manière possible d’acquérir le savoir, ou bien c’est une fois qu’on en aura fini, puisque c’est alors que l’âme, elle-même et en elle-même, sera séparée du corps, mais pas avant. Et tout le temps que nous vivons, nous nous approcherons au plus près du savoir lorsque, autant qu’il est possible, nous n’aurons ni commerce ni association avec le corps, sauf en cas d’absolue nécessité ; lorsque nous ne nous laisserons pas contaminer par sa nature, mais que nous nous en serons purifiés, jusqu’à ce que le dieu lui-même nous ait déliés. Alors, oui, nous serons purs, étant séparés de cette chose insensée qu’est le corps. 5 10 15 20 25 2 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 La copie de l’élève Témoin des dernières heures de Socrate, Le Phédon nous rapporte la réflexion provoquée par la s proximité de la mort du philosophe, développée par son disciple, Platon. Entouré de ses disciples qui l’interrogent, Socrate aborde la question de la mort en questionnant l âme, comme principe interrogent, l’âme, immatériel de l’homme, et le rapport qu mme, qu’elle entretient avec le corps1. Platon pose une différence fondamentale de nature entre le corps – attaché au monde sensible source d’illusion – et l’âme, qui tale illusion est pur esprit. Ce dualisme entraîne un problème au niveau de la recherche du vrai : si le corps ne peut connaître, l’âme enfermée dans un corps peut elle atteindre la vérité et, plus précisément, la âme peut-elle mort du corps est-elle le seul moyen pour l’âme d’atteindre la connaissance ? elle Platon répond, dans ce passage du Phédon, qu’il est impossible à l’âme de connaître tant qu âme qu’elle n’est pas séparée du corps. Nous contesterons dans une deuxième partie cette vision de la vie est comme attente de la mort en remettant en question l l’immortalité de l’âme, présupposé sur lequel âme, Platon fonde sa démonstration2. Platon, dans ce texte, démontre en deux parties, après une brève annonce de sa thèse, que l’âme ne peut connaître que lorsqu elle est séparée du corps. Dans une première partie, il montre âme lorsqu’elle que le corps entrave le mouvement de l l’âme vers la connaissance, c’est est-à-dire une vérité universelle, et dans une deuxième partie, il présente la mort du corps comme nécessaire à l l’âme pour atteindre le vrai. Dans une première partie donc, Platon fait s articuler les concepts de corps et d s’articuler d’âme pour montrer en quoi la connaissance ne peut être acquise par le couple âme-corps. Dès la première i corps. phrase de son texte, Platon associe le corps au mal, puis aux désirs, appétits, peurs, simulacres et futilités. Ici, Platon entend le corps comme siège de la sensibilité, c c’est-à-dire ce qui rattache dire l’homme au monde par ses sens. Or nos sens sont faillibles et le monde ne nous apparaît qu homme qu’à travers nos sens, il ne peut donc nous apparaître pour ce qu il est essentiellement, d qu’il d’où la suspicion du corps. Le désir, comme recherche d’un objet que l’on sait être source de satisfaction (ou les on « appétits »), la peur, comme réaction émotive à une sensation inattendue provoquée par un objet, et le simulacre, comme ce qui se donne l l’apparence de ce qu’il prétend être, relèvent de la il sensation. La suspicion du corps repose sur son attachement au monde sensible, qui peut nous tion. Le mot du prof : La connaissance de l’auteur n’est pas requise, mais si toutefois on a, comme ici, des connaissances qui permettent de situer l’extrait dans son contexte, c’est un plus. ns 2 L’élève formule bien le problème soulevé par le texte : si le corps est un obstacle à la connaissance, faut-il que l’âme soit délivrée du corps par la m il mort pour atteindre la vérité ? Ou la connaissance est u est-elle, malgré le poids du corps, accessible à l’homme en ce monde ? Une remarque pertinente en fin d’introduction annonce une réflexion critique. 1 3 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 plonger dans l’illusion en accordant une part de vérité aux sensations, c est pourquoi Platon illusion c’est soutient que, moralement, le corps est un objet de désapprobation contre l lequel l’homme doit lutter, c’est-à-dire un mal. Si l’homme ne peut connaître par le corps, c est alors son âme qui le homme c’est mènera vers la vérité. Ce que Platon appelle vérité ici est ce qui est universellement et éternellement vrai, que l’âme doit atteindre. L âme se présente ici comme pur esprit, séparée du âme L’âme corps par sa nature immatérielle et immortelle. Si l âme semble ici rejoindre la définition de la l’âme substance, c’est-à-dire qui est par elle dire elle-même et reste pareille à elle-même, elle permet donc de même, savoir purement lorsqu’elle est séparée du corps. Nous entendons par « savoir purement » le fait elle d’atteindre l’essence des choses, c essence c’est-à-dire ce qui constitue leur nature permanente. La dire connaissance du monde ne se fait donc que par la pensée, ici synonyme de l âme, c’est pourquoi il l’âme, faut se séparer du corps qui croit connaître par ses sens, qui ne peuvent atteindre l l’essence des choses, d’où le discrédit du corps qui empêche d accéder spontanément à la connaissance1. où d’accéder Il s’ensuit que, tant que le corps reste attaché au monde sensible, aucune connaissance ne peut ensuit être acquise. Aussi, dans une deuxième partie, Platon, après avoir énoncé sa thèse, explique la nécessité pratique de se séparer le plus possible du corps de notre vivant pour pouvoir atteindre par l’âme, à notre mort, la vérité. Nous entendons ici par « vie » l’intervalle de temps écoulé entre tre intervalle la naissance et la mort d’un individu. Lorsque Platon parle de vie, c est donc celle du corps, l un c’est l’âme étant immortelle et n’étant pas soumise au temps. Comme le corps, dans sa nature matérielle, c étant dans c’està-dire prisonnier de la réalité sensible, par opposition à l esprit, nous plonge dans l dire l’esprit, l’erreur ou l’illusion, il est donc nécessaire qu meure pour cesser d’empêcher l’âme de connaître purement illusion, qu’il âme les choses. La vie du corps entrave donc toute forme de connaissance, l âme étant enfermée dans le l’âme corps. La mort est alors nécessaire pour le philosophe, c c’est-à-dire celui qui veut atteindre la vérité, dire la vie empêchant l’âme d’atteindre l atteindre l’essence des choses. En effet, la mort n’est autre chose que la est dissolution du corps, car l’âme est semblable aux essences : elle ne change jamais. D âme D’après Platon, le corps n’est donc qu’un obstacle : on ne saisit les essences qu’avec la pensée seule et toute pure, un avec ce que les sens sont incapables d d’atteindre, d’où la nécessité de la mort du corps dans l où l’accès à la connaissance. Mais cette démonstration repose sur un présupposé contestable : en effet, si l’âme meurt avec le corps, quel sens prend alors la vie ? Ni la vie, ni la mort ne permettraient a alors d’atteindre la connaissance, alors pourquoi la vie plutôt que la mort2 ? atteindre Le mot du prof : Deux qualités dans ce paragraphe : - le souci de définir clairement les termes (ex : « savoir purement ») ; - un raisonnement très cohérent qui permet de saisir le mouvement du texte. 2 La première partie explique le texte : l’élève démontre d’abord que le corps est une entrave à la ve connaissance. Seule l’âme (immortelle) peut atteindre la vérité (les « Idées »). Puis elle en tire la conséquence : il est nécessaire de se libérer du corps. Dans l’attente de la mort, l’homme doit mett mettre son corps à distance pour accéder à une connaissance même imparfaite. Les explications et le raisonnement sont très clairs. 1 4 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 L’homme doit se détacher du sensible et du corps tout au long de sa vie pour atteindre, par son homme âme, les choses en elles-mêmes après sa mort. mêmes Or, d’après la définition que Platon donne de l’âme, elle existe en elle-même avant la naissance après même d’un homme et après sa mort et reste fidèle à elle même puisque incorruptible, alors elle ôte tout un elle-même pouvoir à l’homme sur son accès à la connaissance. Si l homme l’âme reçue par l’homme détermine sa homme destinée, la vie ne se présente alors que comme une entrave pour connaître et une attente passive née, de la mort, qui délivrera l’âme des illusions du monde sensible. Si ce n âme n’est qu’ se séparant de la ’en vie que l’âme atteint la vérité, l’homme serait alors tenté d’attendre passivement sa mort car l attendre l’âme qu’il a reçue détermine de toute façon son accès ou non à la connaissance. ’il Aussi, que devient l’existence d existence d’un homme si nous mettons en doute l’immortalité de l immortalité l’âme ? Posons que la pensée soit une faculté supérieure d l’homme qui naisse et meure avec de homme lui. L’attitude morbide de Platon qui se complaît dans la fascination de la mort se trouve attitude injustifiée : philosopher n’est plus apprendre à mourir mais à chercher la position la plus proche est possible de la vérité. La conception de la vie par Platon se trouve elle aussi remise en question : ption l’homme ne doit plus se séparer le plus possible de la vie pour atteindre la vérité dans la mort, s mais c’est au contraire en prenant conscience de sa finitude qu il doit prendre en charge les est qu’il responsabilités de sa propre vie, et notamment faire le deuil des réponses aux questions fondamentales qu’il se pose. En effet, étant tributaire du langage pour penser, la vérité absolue lui est donc inaccessible et il ne peut apporter de réponse cert certaine aux questions qu’il se pose sur son existence. Ainsi, par il opposition au discrédit de la vie comme la conçoit Platon, c c’est-à-dire comme entrave de l dire l’âme à atteindre la connaissance, ce serait plutôt sur l horizon de la mort que toute vie humaine peu l’horizon peut prendre sens, car l’homme a conscience de son existence, c homme c’est-à-dire qu’il est conscient d il d’être là sur fond originel de « rien ». Ainsi, c c’est face au néant, c’est-à-dire la non-existence que vient se fonder existence sur le sens : l’homme est appelé à devenir, à s réaliser par la conscience de sa finitude. La vie n homme se n’est donc plus une attente passive de la mort mais ce qui permet à l’homme de devenir et de chercher homme à se réaliser jusqu’à sa mort. Or, si c’est la vie qui lui permet de se réaliser, c est c’est-à-dire ce qu’il sera devenu au moment de sa il mort, c’est par une union du corps et de la pensée qu il donnera du sens à son existence. Ainsi, est qu’il ayant conscience de sa finitude et de son existence, l homme est libre dans ses actes et prend alors l’homme conscience de sa responsabilité sur sa propre vie. Ce seront ses choix et ses actes qui le feront lité devenir : c’est donc par une étroite proximité, voire d est d’une union, du corps – qui le fait être au 5 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 monde dans ses actions – et de la pensée – qui lui permet de faire des choix – que l’homme se réalise de son vivant1. En conclusion, Platon, dans ce passage du Phédon, ne conçoit l’accès à la connaissance que par accès la mort du corps, réduisant ainsi la vie et la liberté d un homme à une attente passive de la mort, à d’un cause de la différence fondamentale de nature opposant l âme et le corps. Nous avons ensuite ndamentale l’âme envisagé une autre conception de la vie s opposant à celle de Platon en posant l s’opposant l’union de l’esprit et du corps comme nécessaire à l homme pour se réaliser, malgré son incapacité à atteindr une l’homme atteindre vérité absolue. Comme nous ne pouvons démontrer que la pensée résiste ou non à la mort, le problème subsiste, au-delà de la question du corps et de la pensée : peut-on atteindre la vérité ?2 delà on Le mot du prof : L’élève propose ici une réflexion critique sur la théorie platonicienne et particulièrement sur la dévaluation du sensible. Elle propose des contre arguments intéressants mais aurait pu être plus n contre-arguments démonstrative. 2 La conclusion résume correctement le propos du texte et l’objection faite par l’élève. 1 6 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 Les appréciations du prof 16/20. Cette bonne copie fournit une analyse détaillée du texte et en comprend bien les enjeux. Difficultés du sujet Ce texte de Platon ne présente pas de difficultés majeures. La fin du texte est importante car elle en donne la dimension morale : la mort serait certes une délivrance pou l’âme, mais une pour connaissance partielle est toutefois possible, à condition de se libérer au maximum des exigences du corps (besoins, désirs). C’est un devoir pour le philosophe de s affranchir des contraintes est s’affranchir corporelles. Un conseil : pensez à bien lire (et expliquer) le texte jusqu’au bout ! Il ne faut pas au hésiter à citer des passages, en évitant absolument la paraphrase. Qualités de la copie L’élève propose une analyse très serrée. Elle ne se contente pas d énumérer les idées mais elle élève d’énumérer reconstruit le raisonnement qui y a conduit. Cette manière démonstrative de procéder se révèle isonnement très efficace. Défauts de la copie La deuxième partie conteste le présupposé de départ du texte et affirme au contraire l l’union fondamentale du corps et de l l’âme. Elle propose une réflexion pertinente. Mais certaines références semblent sous-entendues ( entendues (Spinoza, Nietzsche, Husserl). Les rendre explicites aurait permis de soutenir l’argumentation. ’argumentation. Conclusion Une copie riche et dynamique qui s s’interroge avec pertinence sur le texte proposé. Pour compléter : voir la remise en cause fondamentale faite par Nietzsche sur la valeur de la vérité et la place du corps ainsi que Husserl et la phénoménologie. 7 LES BONNES COPIES DE PHILO Nathalie Vauthier Copie n°12 Découvrez la suite… Vous avez des questions à poser à l’auteur ? Déposez un commentaire sur son blog : taire http://lewebpedagogique.com/bac/ Les autres leçons de cet ouvrage : Copie n° 1 : Dissertation sur la raison et le réel Copie n° 2 : Dissertation sur l'art et la morale rtation Copie n° 3 : Explication d'un texte de Bergson Copie n° 4 : Dissertation sur l'expérience et la vérité 'expérience Copie n° 5 : Dissertation sur la culture et la religion Copie n° 6 : Dissertation sur le travail Copie n° 7 : Dissertation sur la culture Copie n° 8 : Explication d'un texte de Marx Copie n° 9 : Peut-on être hors de soi ? on Copie n° 10 : Faut-il aimer pour respecter ? il Copie n° 11 : Explication d’un texte de Pascal C’est par ici : http://lewebpedagogique.com/boutique/ ! 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